Phytothérapie

Dossier Artemisia (3/4)

Après les parties 1 et 2, suite du dossier consacré à l’artemisia avec un nouveau récit du globe trotter Alexandre Poussin.
Dans le tome 1, l’auteur et sa femme, tous deux atteints de paludisme en Tanzanie ont raconté comment ils s’en sont tirés. Cette fois, ils sont en Éthiopie. Ils se sont guéris avec une tisane de plante, l’artemisia annua.
Cette plante figure à la pharmacopée chinoise depuis 2.000 ans et elle est efficace pour traiter et guérir les cas de paludisme dans quasiment 100% des cas selon les essais cliniques.
Les résultats sont en cours de validation par la communauté scientifique, les études vont paraître prochainement.
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Repos à Sodo, mercredi 11 décembre 2002, 713ème jour, 8 747 km.

Image : Guide du Routard

Nous passons là quelques jours à cicatriser nos plaies et nos cœurs. Il faut d’abord tirer au clair cette étrange fièvre. Mary, le médecin de la mission, est tout de suite venu me faire un prélèvement sanguin. Elle revient peu après avec le verdict :
Malaria cérébrale. Un falciparum corsé ! Vu votre état de choc et votre faiblesse générale, si vous ne vous étiez pas arrêté ici, vous auriez pu être emporté en trois jours…
Elle est en Ethiopie depuis vingt ans et s’est spécialisée dans les traitements antipaludéens. Elle se félicite que nous ayons avec nous nos traitements de di-hydro-artémisinine, médicament que j’avais testé lors de ma première crise de palu, à Mitundu (1) :
– Vous connaissez l’histoire de la di-hydro-artémisinine ?
– Oui. C’est un médicament chinois…
– Vous savez de quoi on le tire ? Vous voyez ma plantation de fleurs orange, là, dans le jardin ? Celles qui ressemblent des gerberas ? Eh bien voilà ! C’est ça qui sauve les vies ! C’est aussi simple !
– Comment ça ?
– Cette fleur s’appelle l’armoise amère. Je fais une simple tisane avec les pétales séchés et je sauve des gens par centaines…
– Et aucun laboratoire occidental n’a trouvé ça ?
– Héhé ! Vous mettez le doigt sur le problème ! Cette molécule est connue des Chinois depuis 1975. Ils l’ont découverte en soignant des blessés vietcongs rapatriés du Vietnam. Ce médicament a eu le malheur d’être inventé par des communistes en pleine guerre froide : cela fait trente ans qu’il y a un embargo dessus… Les Chinois ne demandent rien à personne et soignent toute l’Asie avec. Les Indiens l’ont copié, il n’y a plus que nous nous qui nous obstinons.

Pour le malheur de l’Afrique… Le vrai problème, en fait, c’est que ce médicament qui ne coûte rien alors que les traitements modernes développés péniblement par nos laboratoires coûtent les yeux de la tête. Entre un dollar et cent dollars, vous choisiriez quel traitement ? D’autant plus que celui à un dollar marche beaucoup mieux, vous l’avez testé vous-même ?!

– Mais l’OMS, les organismes internationaux… ?
– C’est là qu’est l’immense scandale, vous allez voir cette histoire va bientôt nous péter à la gueule. Ils ont mis trente ans à s’intéresser à cette molécule ! J’aimerais qu’on me dise pourquoi. Moi par exemple, je dépends des organismes internationaux pour mon approvisionnement en médicaments. Vous le savez, l’Ethiopie est sous contrôle sanitaire de très nombreux organismes. Et comme la di-hydro-artémisinine n’est pas reconnue officiellement, je n’ai pas le droit de l’importer…
– Mais qu’est ce qu’ils avancent comme raison pour la rejeter ?
– Oh ! Que les tests n’ont rien prouvé, qu’ils sont lourds et très longs à mettre en place, qu’il faut la synthétiser, que c’est une molécule très complexe…
Nous sommes bouche bée. Comment des enjeux aussi importants peuvent-ils être bloqués par des intérêts si piètrement marchands ? Mais Mary positive :
– Remarquez, je me débrouille quand même avec mes plantations. Mais vous allez devoir boire un litre de ma tisane par jour, et c’est vraiment très mauvais…

Écoliers buvant de la tisane d’artemisia annua

Je me remets de ma malaria en quarante huit heures. Comme à Mitundu. Ca relève du miracle… En effet, ce médicament est vraiment dangereux pour l’Halfan, le Lariam et nos autres merveilles (2) !… Trois mille enfants par jour meurent du palu, en Afrique. Combien, depuis trente ans ? Nous allons chez dîner chez Vic et Cindy. Ils ont adopté deux petits Éthiopiens. Jérusalem, une fillette de douze ans d’une maturité exceptionnelle, Philippe, neuf ans, beaucoup plus turbulent… Vic, très gentiment nous demande :
– Depuis quand n’avez vous pas parlé à vos parents ?
– Par téléphone, il y a près de deux mois et demi, à Nairobi, mais on a pu leur faire passer des nouvelles par Louise Leakey, à Koobi Fora. Je suis sûr que ça leur fera plaisir d’apprendre que nous avons pu passer des frontières et que nous sommes sains et saufs…
Nous les appelons ; ils nous confirment leur visite pour Noël, à Addis. Enfin une bonne nouvelle ! Vic et Cindy sont pétrifiés par nos récits. Ils ne se déplacent qu’en voiture. Ils reçoivent des pierres de temps à autres, mais rien de tel. Sur le terrain, ils sont toujours encadrés par des guides, des traducteurs, des paroissiens, et sont toujours très bien reçus partout. Ils ont vraiment du mal à nous croire.
– Mais qu’est-ce que vous faites pour mériter ça ?
La question nous transperce le coeur. Nous savons déjà qu’elle va nous être posée des centaines de fois. Car il faut bien une raison à de tels comportements… Pas une déraison.
– Rien, nous ne faisons rien, et quoi que nous fassions, c’est pire.
– Mais pourquoi alors vous obstinez-vous à marcher, à prendre de tels risques ; moi, j’aurais pris une voiture ou un camion dès le premier village ! Vous ne seriez pas un peu maso…
Maso ! Oui, peut-être… Alors, c’est toute notre marche qui est maso. Africa Trek est maso, nous masochions sans le savoir…
Révélation à Sodo : nous sommes maso !
Nous tentons alors de leur expliquer que nous ne voulons pas tricher avec l’espace, avec le temps, avec le fil de notre marche, avec le sens que nous avons voulu lui donner, avec toutes les promesses et toutes les prières dont nous sommes porteurs, avec le souvenir de nos “sauveurs d’un jour” qui nous ont accueillis justement parce que nous marchions. (…)
(1) cf. tome 1.
(2) Depuis notre retour, la situation semble se débloquer pour la di-hydro-artéminisine. Sa connaissance officielle comme thérapie complémentaire par l’homme a eu lieu quelques mois à peine avant notre passage à Sodo, en avril 2002. Mais l’information n’était pas encore parvenue jusqu’à Mary. Sa production a été confiée à deux laboratoires occidentaux. La presse n’a commencé à en parler qu’en 2004 avec les déclarations fracassantes, faisant passer le mérite de la découverte à ces mêmes laboratoires… En Chine, le médicament est en fait connu depuis 2000 ans. En France, Médecins sans frontières a été à la pointe du combat pour sa connaissance.

Pour acheter le livre, c’est chez votre libraire ou ici : http://amzn.to/2nZ9jSQ.
Dans la quatrième et dernière partie de ce dossier, l’artemisia sera abordée sous les angles botanique, agricole et thérapeutique. Tout ce que vous avez voulu savoir sur l’artemisia sans oser le demander… Et vous saurez comment vous procurer des semences et vous apprendrez comment la cultiver dans votre jardin !
Portez-vous bien !
 Florian KAPLAR
Diététicien-Naturopathe
© Naturo-Passion.com

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